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🏖️ Spécial retour de vacances : À quoi occuper son temps libre ?

  • Photo du rédacteur: philotrek
    philotrek
  • 1 sept.
  • 6 min de lecture
Crédit photo : Blandine Templier
Crédit photo : Blandine Templier

📈 Le contexte de la question :


Selon une étude OpinionWay pour Factorial de juillet 2025, 64% des salariés français ont du mal à se remettre au travail après leurs vacances, ce qui peut suggérer au moins 2 questions alternatives :

  • Quelle est l’utilité du temps de vacances si on n’en revient pas reposé ?

  • Quel est le sens de notre travail si l’on a si peu envie de s’y remettre ?


💡 Pour éviter d’être déçus à la fois et de son travail de ses vacances, nous sommes donc invités à prendre un peu de recul et à nous demander : selon quels critères a-t-on intérêt à choisir ce qui occupe notre temps libre, ou notre travail ?


En préalable, il faut définir : avoir du temps libre, c’est avoir du temps que nous ne sommes pas obligés de consacrer au travail, c’est-à-dire à l’activité productive.


 Il y a plusieurs façons d’occuper le temps libre, comme l’ont montré, par exemple, Pascal, Marx et Aristote, mais elles ne sont pas toutes propices à l’accomplissement personnel, et pas toutes étanches à la vie professionnelle :


👉 Occuper le temps libre par la récupération de l’énergie dépensée dans le travail,  pour pouvoir continuer de la mettre dans le travail :


🎭 Prenons l’exemple du jeu ou l’amusement : ce sont de toute évidence des activités propres au temps libre. Mais ces activités n’ont pas suffisamment de valeur en elles-mêmes pour être reconnues comme les finalité du travail d’un individu. En effet, remarque Aristote, se dépenser avec tant d’ardeur et de peine [dans le travail]  en vue de s’amuser ensuite est de toute évidence quelque chose d’insensé et de puéril à l’excès ; au contraire, s’amuser en vue d’exercer une activité sérieuse, voilà la règle à suivre. Le jeu est, en effet, une sorte de délassement, du fait que nous sommes incapables de travailler d’une façon ininterrompue et que nous avons besoin de relâche.


Si, comme l’explique Karl Marx, le temps libre que nous offrent les congés payés est un temps nécessaire à ce que [le travailleur] puisse revenir frais et disponible pour la production de plus de valeur”, alors le jeu et l’amusement sont des façons très adaptées d’occuper ce temps.  


🎩 Mais Marx montre qu’il y a une difficulté à considérer le temps libre uniquement de cette façon : cela revient à penser que toute la vie du salarié est en vue du travail, c’est-à-dire de l'activité productive (et, en définitive, en vue d’un capital qui ne lui appartient pas). En effet le salaire du travail ne sert qu’à maintenir le salarié en forme par l’accès aux biens de première nécessité et aux activités propres au repos. De fait, il y a des temps libres “offerts” qui sont des manœuvres de gestion.


💡 Cela pose la question de l’équilibre vie pro/vie perso dans nos sociétés, puisqu’avec cette façon de voir les choses, la vie perso ne semble avoir de sens que par rapport à la productivité de la vie pro.


👉 Occuper le temps libre par le divertissement :


⏱️ Lorsque le temps libre ne couvre pas simplement le strict nécessaire pour recouvrer nos forces, il ouvre des durées où la pensée n’est pas occupée aux affaires du monde, s’ennuie, et risque assez naturellement de se concentrer sur soi-même.


🪞 On pourrait croire que la possibilité d’arriver enfin à ce moment représente un soulagement ! Pourtant, Pascal nous montre que ce moment suscite généralement une crainte terrible. En nous concentrant sur nous-mêmes, nous pourrions rencontrer nos limites :

  • L’ignorance (je ne connais pas à quoi tiennent les opinions sur lesquelles ma vie est fondée)

  • La misère morale (je ne sais pas où mènent mes actions, à quoi elles sont bonnes),

  • La perspective de la mort !


🫠 Pour éviter cela, il est plus commode de trouver à s’occuper, de multiplier les activités qui évitent à l’esprit de se trouver dans une disposition de réflexion sur soi (cinéma, plage, magazine, dodo, kite surf…).


💡 Ainsi, le travail comme les occupations du temps libre peuvent être du divertissement, c'est-à-dire une façon de se détourner de soi-même et de sa propre misère.


Pour Pascal, c’est un vrai problème : cette situation révèle une condition humaine dans laquelle il est presque impossible de s’occuper véritablement de soi-même, ce qui est pourtant nécessaire au bonheur. “Tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre”.


👉 Occuper le temps libre par le loisir : 


📚 Avoir du loisir, selon Aristote, c’est avoir l’opportunité de s’extraire des contraintes et nécessités de la vie pour exercer des activités qui sont en elles-mêmes une fin pour soi. C’est le cas par exemple lorsqu’on exerce sa passion : on s’adonne à une activité pour la joie simple de s’y adonner, par la conscience que l’on a du bien que celle-ci représente en elle-même pour nous.


🪞 Ce n’est pas du divertissement, parce que ce n’est pas une fuite de soi mais au contraire un accomplissement de soi. En effet, si une activité est une fin pour moi, c’est qu’elle est l’objet d’un amour profond en moi qui dit quelque chose de qui je suis, et par lequel je m’accomplis. C’est d’ailleurs sur cette intuition que se fondent quelques outils de connaissance de soi utilisés dans les bilans de compétence :

afin de pouvoir pratiquer des activités d’une façon accomplissante, il faut pouvoir identifier celles qui s’y prêtent pour soi. Et donc il est nécessaire de bien se connaître.


😏 C’est pourquoi les choses qui nous importent le plus sont très personnelles, relèvent de l’intime, et peuvent prêter à rire (à tort) lorsqu’elles ne sont pas partagées par les autres. Par exemple, dans Le Dîner de Cons, le personnage de François Pignon prête à rire parce qu’il ne se rend pas compte qu’il est en décalage par rapport à Pierre Brochant et ses amis. S’il est en décalage, c’est parce qu’il est à la fois intimement passionné par la fabrication de maquettes en allumettes, et totalement persuadé que, puisque ça le passionne, tout le monde doit être passionné de la même façon. Mais l’activité de fabrication de maquettes en allumettes ne convient manifestement qu’à un petit nombre de personnes en tant que loisir.


En revanche, ce n’est pas parce que la question de savoir quelles activités peuvent faire office de loisirs est très personnelle, et donc propre à chacun, qu’aucune d’entre elles ne peut ou ne doit être partagée, et même préférée aux autres. Aristote donne d’ailleurs le critère de l’activité de loisir par excellence : qu’elle ne puisse en aucun cas être faite pour avoir une application pratique, car de cette façon elle ne peut être qu’une fin en soi. Et selon lui, l'activité qui répond le mieux à ce critère est la contemplation métaphysique des “premières causes et des premiers principes des choses”. Mais il n’est pas nécessaire d’aller jusque là pour notre réflexion.


🎯 Revenons-en à la séparation temps libre / travail :

La définition que donne Aristote du loisir indique une vérité étonnante : l’activité productive peut, dans certains cas, être en même temps un loisir. En effet, l’activité de loisir est possible même lorsqu’on pratique une activité qui a une certaine utilité, mais dont l’utilité n’est pas tout ce que l’on y cherche (par exemple un fan de bricolage, cherchera toujours à bricoler quelque chose chez lui, quand bien même ce ne serait pas utile).


💡 On peut donc trouver son accomplissement tantôt dans les activités du travail, tantôt dans les activités auxquelles on s’adonne dans le temps libre. La question cruciale pour mon travail comme pour mon temps libre est donc la suivante : dans quelles activités puis-je m’accomplir et comment les hiérarchiser pour en tirer le meilleur ? A partir de là, on trouvera des indications pour mettre chaque activité, dans le travail comme dans le temps libre, à sa juste place.


🔥 Tout cela nous renvoie à la fameuse injonction de Platon : “Connais-toi toi-même”.

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© Philotrek

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